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Archive -Seychelles

Corsaire, commerçant, juge et humaniste ! |01 April 2016

L’Ile Hodoul sera bientôt en partie transformée en premier Musée de la Marine des Seychelles. L’occasion idéale de redécouvrir l’illustre personnage qui a donné son nom au petit ilot situé dans le port de Victoria…

Jean-François HODOUL est né le 11 avril 1765 à La Ciotat, une commune du département des Bouches-du-Rhône dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur du sud de La France. Son père, Raymond, était charcutier et sa mère, née CAUVIN, se prénommait Geneviève.

Il part à 24 ans dans l’océan Indien et arrive à bord du « Scipion » à l’Ile Maurice en 1789, où il fait du trafic d’esclaves avec les Seychelles et Madagascar. Il commande, à 27 ans, le navire « Les Deux Sœurs » en partance de Port Louis, puis le brick « Succès » vers Madagascar et Kilwa en Tanzanie.

Il épouse en juin 1794 Mairie Corantine Olivette Jorre de St Jorre, âgée de 16 ans, la fille d’un riche propriétaire de Flacq, à Maurice.

Jean-François Hodoul abandonne alors la carrière de négrier puis entame celle de corsaire en 1794, à bord de son navire « l’Olivette », baptisé du nom de son épouse. En mai de cette année, surpris dans le port de Mahé aux Seychelles par l’incursion de quatre vaisseaux anglais accompagnés de deux prises françaises et commandés par l’amiral Newcome, il est obligé de se rendre malgré une résistance héroïque. Son navire est alors réquisitionné.

De retour à Maurice, on le retrouve en 1796 comme enseigne de vaisseau à bord du corsaire « Entreprise », puis sur le « Pichegrue », récemment pris aux anglais et à bord duquel il se rend en Inde. Sur la route des Indes il capture la prise anglaise « Le Castor » et le ramène à Port Louis.

 Commandant du corsaire « Apollon »

 En mai 1797, il est promu commandant du corsaire « Apollon », navire de dix canons et six obusiers nouvellement arrivé de Brest. Il va écumer les mers pour traquer tout ce qui porte pavillon anglais.
En mer depuis une semaine à peine, il prend en chasse, au large des côtes de Malabar, un vieux trois-mâts « L’Eliza » (pris auparavant aux français et commandé par l’anglais William Brown) lequel, après une course poursuite, est contraint de se rendre.

Six jours plus tard, il récupère sept esclaves encore vivants à bord d’un navire anglais abandonné par son équipage après une tempête et capture trois jours après, « l’Edroussi », un petit navire anglais. Fin mai, il poursuit, sur la route de Coringa, l’anglais « Le Macroy » dont une partie de l’équipage tente de s’échapper sur une chaloupe. Mais Hodoul poursuit les fuyards et ils abandonnent sur la plage un gros coffre rempli de perles! Le 15 septembre de la même année, il capture l’anglais « Bader Bux ». Il y découvre 3 732 écus d’or, quelques piastres, 296 sequins et une grande quantité de perles.

De retour à Maurice, il capture encore le 30 octobre le « Laurel » du commandant Fugo, puis, le 9 novembre « La Trayalle » et le « Harrington » dans la même journée!

Sa vaillance au combat ne l’empêche cependant pas de se montrer magnanime et loyal : Ayant capturé un riche marchand anglais qui transportait avec lui toute sa fortune en or, il le libéra dans un port indien sans le rançonner d’aucune manière. Car, le britannique portait sur lui les témoignages de français en difficulté qu’il avait aidés auparavant.
Durant cette expédition sur « l’Apollon », le total des prises fut estimé à 703.479.803 Francs de l’époque!

Arrivé à Maurice fin 1797, Hodoul vend « l’Apollon » à un autre corsaire dit Le Vaillant, qui va en prendre le commandement. Le navire appareille le 22 août 1798, mais après avoir capturé une riche prise portugaise, il est arraisonné par le « HMS Léopard » le 10 novembre, au large de Mombasa et l’équipage est emmené aux Comores.

En juin 1799, Marie Corantine Olivette donne naissance à un premier enfant, Raymond. Mais Hodoul est repris par la « course » ! Il achète "L’UNI", un bateau de 220 hommes d’équipage et armé de 32 canons et 18 obusiers. Il appareille le 15 mai 1800 et la "curée" reprend : Prise fin mai au large de Ste Anne, aux Seychelles, du corsaire anglais de huit canons « Henriette » commandé par le capitaine White. En juillet, c’est le tour du "Helen" avec 80 000 piastres à bord. En août, le "Friendship".

Mais le 5 août 1800, "L’Uni" est à son tour capturé par "Le HMS Arrogant" dans la baie du Bengale. Hodoul et son équipage sont débarqués à Madras et emprisonnés à Calcutta au fort Willam. Ils ne seront libérés que deux ans plus tard, en août 1802, lors des accords de  Paix d’Amiens par lequel Napoléon Bonaparte cesse les hostilités avec l’Espagne. Hodoul va alors s’installer à Mahé. Il fait construire à Les Mamelles, au sud de l’actuelle capitale Victoria, une belle demeure.  Il achète aussi des terres sur la côte est de Mahé, y établit une plantation de cacao et fait construire une autre maison qu’il baptise « Ma Constance ».

 Des campagnes commerciales plus posées

En 1803, Hodoul fait reconnaître sa qualité de capitaine de vaisseau marchand mais reste à terre et s’établit su l’île de Silhouette. Après 1805, il abandonne l’habit de corsaire et entame des campagnes commerciales plus posées et revient plus souvent à terre.

En janvier1805, il commande le brick « Rosalie », 45 tonnes, puis, de 1806 à 1808, le brick « Mahé » 25 tonnes et en 1809-1810 la goélette « La Favorite » 70 tonnes. Il fait du « commerce » avec l’Afrique avec du coton, des noix de coco, de l’huile, des écailles de tortue et malheureusement très souvent des esclaves.
Entre juin et juillet 1819, son fils Raymond, 20 ans, commande la goélette « Six Sœurs » de 200 tonnes quand éclate un incendie dans les balles de coton et gagne le navire. Un seul canot disponible pour les 65 embarqués ! Un terrible choix est incontournable : les femmes et les enfants d’abord, puis, les esclaves (!) et les officiers. On doit abandonner à la mort une partie de l’équipage. Commence alors une épopée à l’issue de laquelle le canot parvient enfin à l’île de La Digue. On ne comptera que 30 rescapés.

Vieillissant, Hodoul devient l’une des personnalités les plus respectées mais aussi fortunées de la région. Il n’arrête pas les transactions immobilières : Il vend sa propriété de l’île de Silhouette, une parcelle de l’île Ste Anne, achète l’île Desroches, reprend une partie de Silhouette, crée avec son fils Raymond un « établissement maritime » dans le port de Victoria. Son sens de l’équité lui vaudra même d’être souvent nommé Juge par ses concitoyens.

Cet écumeur de mer va mystérieusement décéder sur sa terre de Mahé à 70 ans. Le 10 janvier 1835, il part visiter sa plantation à cheval. Mais la monture revient seule. Après de longues recherches, on retrouve son corps inanimé. Il est probablement une crise cardiaque.

Il fut inhumé au cimetière de Bel-Air, où l’on peut encore voir sa tombe avec, au dessous du dessin d’un trois mâts, une épitaphe le qualifiant de « JUSTE». Cette qualification ne semble pas être usurpée. Car, de multiples récits confirment la bonté avec laquelle Hodoul avait traité prisonniers, marins capturés ou esclaves dont il avait eu la charge. En dépit de l'infâme commerce des hommes, horriblement banalisé à l’époque, il fut malgré tout unanimement reconnu pour sa générosité. A tel point que nombre de sites rappellent encore son nom sur les cartes de l’océan Indien : l’Ile Hodoul dans le Port de Victoria, le Rocher Hodoul et la Rivière Hodoul à Mahé, la Passe Hodoul à l’île Desroches et la Pointe Hodoul à Aldabra…

Autant de témoignages de reconnaissance de la curieuse mais sincère « humanité » dont fit preuve le redoutable corsaire.

Et quelle coïncidence, le bâtiment La Ciotat, propriété de ses descendances à Mont Fleuri  dans les banlieues de Victoria, abrite l’Ambassade de France !

 

 

 

 

 

 

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